[gull] Microsoft, ebook et DRM

Marc SCHAEFER schaefer at alphanet.ch
Sat Oct 26 10:25:00 CEST 2019


Salut,

la distinction entre licence d'utilisation et objet physique
est intéressante. Elle ne semble pas être si fondamentale:
un média physique (Blueray) avec DRM ou un fichier avec
DRM a les mêmes problèmes à terme (voir exemple ci-dessous).

Toutefois, quelque soit le type (physique, fichier, fichier avec DRM),
le droit à la copie privée s'applique à mon sens [1].

La justification au droit de copier les oeuvres pour des personnes
étroitement liées est que nous payons pour cela (taxes diverses,
notamment sur les médias). De mémoire, nous versons de l'ordre
de 250 M CHF par an à la Suisa, ce qui fait que la Suisse
est un des pays où ce système fonctionne le mieux.

Intéressant est de constater qu'avec une licence d'utilisation
limitée dans le temps (ou limitée par la force des choses
à cause des DRM et de la durée de vie courte de certains
modèles économiques d'entreprise, comme l'exemple du
cloud Microsoft cité), on paie plusieurs fois:

   - on paie l'achat de la licence d'utilisation de l'oeuvre
   - on paie le média via les taxes de la copie privée
     (sans pouvoir bénéficier des droits afférents)
   - on doit repayer la licence ensuite en cas de faillite
     ou de problème technique DRM

De plus, si des DRM s'appliquent et modifient une licence
d'utilisation classique en une licence limitée dans le temps
sans que l'acheteur n'en ait été informé clairement
avec ce temps non connu à l'avance, j'ai un doute que cela
soit compatible avec la loi. Rappelons que les clauses abusives
d'un contrat peuvent être annulées (en particulier celles qui
violent la loi).  On croit souvent naïvement que `nul n'est
censé ignorer la loi': un contrat n'est pas `la loi', et
des clauses très surprenantes de contrats peuvent être combattues;
la loi elle même ne peut invoquer cet argument que si elle n'est
pas surprenante (Jacques Barillon, Justice Vrai ou Faux, 
EAN-13 9782832102626, exemple d'une loi avec les mêmes conséquences
mais dont le critère d'application varie entre deux cantons sur le
poids des chiens devant mettre une muselière).

Notons que la présence de DRM fait vraisemblablement s'appliquer
l'article qui interdit le contournement de mesures techniques
de protection [2]. Il serait intéressant de savoir ce qu'en
penserait la justice si une oeuvre vendue à titre d'une
licence d'utilisation classique devait devenir inaccessible
par la suite, en raison de DRM et/ou de faillite d'entreprise,
fin d'activité: pensons aux lecteurs Blueray dont l'autorisation
de déchiffrer les médias peut être révoquée[3] (procédé Broadcast
Encryption); c'est d'ailleurs encore pire avec les lecteurs
connectés. Les frais résultants pour l'utilisateur pourraient
être sensiblement plus élevés que l'achat d'un nouveau média.

Toutefois l'alinea 4 de [2] pourrait être interprété comme
une solution possible, le droit de contourner les mesures
si c'est pour une utilisation légitime (ce qui ne garantit
pas la faisabilité, toutefois).

PS: je ne suis pas avocat et je n'ai pas souvenir de si
    ces clauses ont déjà été testées par le TF dans des
    cas spécifiques.

[1] https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/19920251/index.html#a19
[2] https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/19920251/index.html#id-3a
[3] https://fr.wikipedia.org/wiki/Media_Key_Block#Vuln%C3%A9rabilit%C3%A9s_et_inconv%C3%A9nients


More information about the gull mailing list